Revisiter les stratégies d’adaptation à la sécheresse des plantes pour anticiper le devenir des écosystèmes naturels et cultivés
Résumé: De nombreuses régions du monde connaissent une augmentation significative de l’aridité sous l’effet du changement climatique. En Méditerranée, les sécheresses sont de plus en plus longues, précoces, intenses, et génèrent des deficits hydriques saisonniers, annuels ou pluri-annuels parfois extrêmes. Afin d’anticiper la réponse et le devenir des écosystèmes, il est crucial de comprendre (i) comment les plantes s’acclimatent et s’adaptent à des sécheresses sévères et chroniques, (ii) comment elles interagissent entre elles dans ces conditions difficiles et (iii) comment la biodiversité végétale contribue à la résistance/ resilience face à ces changements. Le défi à relever pour décrire et évaluer les différentes formes d’adaptation à la sécheresse des plantes provient du fait qu’elles reposent sur des ajustements physiologiques dynamiques et des co-variations complexes de plusieurs types de traits (physiologiques, hydrauliques, morpho-anatomiques, allométriques, phénologiques…) qui sont difficiles à intégrer à l’échelle du phenotype et qui diffèrent selon les environnements. D’autre part, malgré des attendus théoriques de plus en plus partagés, les effets positifs de la biodiversité (complémentarité, facilitation, effet d’assurance) deviennent très incertains lorsque l’aridité augmente et demandent à être davantage étudiés en considérant plus explicitement les traits des plantes et les mécanismes d’interaction.
Cet exposé sera l’occasion d’aborder ces problématiques dans le contexte particulier des écosystèmes cultivés et pâturés du Nord et du Sud de la Méditerranée. Je présenterai des travaux à la croisée de l’écologie fonctionnelle, de l’écophysiologie et de l’agroécologie sur (i) la variabilité intraspécifique de l’adaptation à la sécheresse chez les espèces pérennes cultivées, et (ii) l’effet des associations d’espèces et de l’agroforesterie sur la résistance/ resilience à la sécheresse. Puis, je proposerai des perspectives de recherche qui visent à poursuivre les efforts d’intégration phénotypique des traits d’adaptation à la sécheresse, la caractérisation des variations intraspécifiques, et l’évaluation de l’importance des interactions entre plantes. Je discuterai de l’opportunité d’étendre ce travail le long de gradients environnementaux dans des biomes marqués par l’aridité (Méditerranée, déserts) ou pour lesquels les sécheresses saisonnières sont une préoccupation grandissante (tropiques humides, milieux insulaires), en relation avec le production de données standardisées pour des analyses comparatives et la modélisation des écosystèmes.