Diploma defense - Thesis

Caractérisation de l'impact des feux anthropiques de la période précolombienne sur la végétation forestière de la Réserve Naturelle des Nouragues en Guyane française par une approche anthracologique

25/11/2019 de 14h00 à 18h00Salle Louis Thaler, campus du Triolet, ISEM, Montpellier

La forêt amazonienne a longtemps été l’archétype de la forêt « vierge », peu ou pas impactée par les activités humaines passées. Pourtant, les preuves d’une présence humaine ancienne et abondante s’accumulent depuis quelques décennies, parmi lesquelles de vastes étendues de terras pretas. Ce sont des sols fortement enrichis en éléments nutritifs, très fertiles et dont l’origine anthropique ne fait maintenant plus aucun doute. Ils sont la preuve que les sociétés précolombiennes ont eu sur leur environnement un impact considérable, bien que pas nécessairement délétère ni irréversible. Sur le plateau des Guyanes, le débat sur l’importance de cet impact reste encore largement ouvert. C’est dans ce contexte que s’inscrit cette thèse, qui s’intéresse à l’impact des populations précolombiennes sur la végétation forestière de la Réserve des Nouragues en Guyane française. Ce travail cherche à caractériser cet impact grâce à une approche anthracologique – l’identification des charbons de bois, une méthode très peu utilisée en Guyane et dans les écosystèmes tropicaux en général. Du fait du caractère exploratoire de l’anthracologie en Guyane, une partie importante de la thèse est consacrée à la méthodologie.
Dans un premier temps, une clé d’identification spécifiquement adaptée aux caractères anatomiques observables sur les charbons de bois et ciblant les espèces de Guyane a été mise en place afin de faciliter et d’optimiser le processus d’identification. Ensuite, différentes méthodes d’échantillonnage des charbons – prélèvements sur profils de sol, prélèvements à la tarière et prélèvements opportunistes sur buttes de déracinement ou lors de creusements – ont été comparées. Les résultats montrent que les trois méthodes doivent être utilisées conjointement afin obtenir les assemblages de charbons les plus riches en taxons et donc les plus représentatifs possible de la végétation passée. Enfin, les datations au carbone 14 effectuées sur les charbons récoltés au cours de la thèse indiquent que les Nouragues ont connu deux grandes périodes d’occupation humaine, la première s’étendant entre 1300 et 1000 ans avant nos jours et la seconde entre 600-400 ans avant nos jours. Les assemblages de charbons montrent que ces occupations ont induit des changements de végétation importants sur certains sites où la forêt a laissé place à des formations végétales très différentes, dominées par des pseudo-bambous ou des lianes.
Les résultats suggèrent que l’une des formations de bambous pourrait s’être mise en place après l’abandon d’une parcelle de culture semi-permanente, rejoignant ainsi des hypothèses formulées dans des travaux d’écologie historique antérieurs. Les résultats des analyses anthracologiques montrent également la présence d’espèces utiles et d’espèces de végétation perturbée, traduisant ainsi l’impact des populations sur le milieu forestier. Enfin, la sélection du bois de feu semble avoir été adaptée en fonction de la végétation locale. Le type d’activité à l’origine de ces changements de végétation reste à définir (e.g. habitations, activités agricoles, rituelles) et la compréhension des sites précolombiens de Guyane française, comme partout ailleurs en Amazonie, devrait être améliorée grâce aux apports complémentaires d’autres disciplines.

Le jury sera composé de :
Etienne DAMBRINE, directeur de recherche INRA, RAPPORTEUR
Isabelle THERY-PARISOT, directrice de recherche CNRS, RAPPORTRICE
Pierre-Olivier ANTOINE, professeur Université de Montpellier, EXAMINATEUR
Bernard RIERA, chargé de recherche CNRS, EXAMINATEUR
Stéphanie THIEBAULT, directrice de recherche CNRS, EXAMINATRICE
Laurent BREMOND, maître de conférences EPHE, DIRECTEUR DE THESE
Jean-François MOLINO, chargé de recherche IRD, CO-ENCADRANT DE THESE